vendredi 5 octobre 2012

Que se passe-t-il en Catalogne, de l’autre côté de la frontière ?

Que se passe-t-il en Catalogne,
de l’autre côté de la frontière ?
Gentil Puig-Moreno, octobre 2012

Comment expliquer ou faire comprendre à des citoyens français de bonne volonté, qu’ils soient de Ceret ou d’ailleurs, pétris par une République française unitaire, centraliste, et profondément jacobine, ce qui se passe très près de chez nous, en Catalogne Principat et dans l’Espagne des autonomies ? Doit-on rappeler que celle-ci est issue de la transition démocratique (1977-1981) qui a décentralisé et réorganisé l’Etat franquiste en un état moderne de type fédéral ?

La gageure de l’explication est de taille, j’en conviens, mais j’en ai l’habitude. D’un côté, je reconnais avoir été formé, comme fils d’exilé républicain catalan par cette même école républicaine française qui, je le reconnais volontiers, a de grands mérites puisqu’elle m’a moi-même conduit jusqu’à un doctorat de sciences du langage. Je ne saurai la critiquer, bien au contraire. Mais d’un autre côté, une chose est l’école, la langue et la culture françaises, et une autre, bien différente, est l’organisation de l’Etat républicain, son hypercentralisme et le peu de respect de sa propre diversité; que ce soit celle des cultures, dites régionales, ou des cultures immigrées, qui font pourtant la richesse et la vie des éco-systèmes culturels de toute société moderne.

De ce point de vue l’exemple de la Catalogne est un contre-modèle, ou un modèle différent, de celui de la République française. Il démontre que l’on peut tout aussi bien intégrer, renforcer le vivre ensemble et l’égalité, défendre l’école publique et les services publics, respecter les autres cultures dans une optique de tolérance et de respect mutuels, tout en affirmant et en consolidant l’identité historique du peuple catalan. De ce point de vue, et dans sa modestie, la Catalogne n’a rien à envier à la République française, car elle aussi, elle a une langue qui a mille ans d’histoire derrière elle.

Mais dans l’Etat espagnol, au delà de l’autonomisme ou du fédéralisme, qui en France n’ont jamais eu cours ni existé, ce modèle semble aujourd’hui complètement épuisé et de plus en plus refusé en Catalogne. Les raisons de ce refus sont multiples et elles ne dépendent pas uniquement de la crise économique. Devant un tel panorama certains peuvent être confortés par une République “une et indivisible”. Mon propos n’est pas ici de les dissuader car je veux parler de la Catalogne.

Aujourd’hui les responsables politiques catalans se rendent finalement compte qu’une des erreurs fondamentales du modèle d’Etat autonomiste fut la formule “cafe para todos”, ce qui signifiait que certaines régions sans une identité forte ou nationale ne voulaient pas être écartées du processus démocratique en cours et voulaient en bénéficier quitte à s’inventer une identité. La Catalogne et le Pays Basque avaient été les moteurs de cette revendication, à laquelle se rajoutaient la Galice et l’Andalousie. Dans la constitution de 1978 on appela historiques ces quatre autonomies, mais ce n’était pas suffisant pour résoudre la contradiction de fond concernant les communautés à fort caractère national de celles qui ne l’avaient pas. Ce modèle inégal a malgré tout fonctionné pendant 30 ans avec des hauts et des bas. Le Pays Basque s’en est mieux sorti que la Catalogne car le système de Fueros historiques Basques a été reconnu et respecté par la démocratie espagnole. Ce qui signifie qu’elle prélève l’impôt et renvoie à l’Etat central la part convenue. Rien de semblable pour la Catalogne et les autres autonomies qui reçoivent (ou pas) la part qui leur correspond. C’est l’Etat central qui décide en fonction des majorités aux Cortès et dans les parlements autonomes.

Si l’autonomie catalane connaît aujourd’hui une crise profonde c’est à cause d’une concertation économique non respectée depuis des années par l’Etat Central, qui a aggravé dangereusement la situation économique de la Catalogne. La Generalitat de Catalunya (gouvernement autonome de Catalogne) se sent désormais complètement étranglée par l’Etat central conservateur de droite du Parti Populaire de Mariano Rajoy. C’est ce que l’on oublie de préciser dans les média français, contrairement aux média internationaux, surtout anglo-saxons.

La revendication de l’indépendance éclate aujourd’hui avec une force inouïe et il semble que les catalans ne veulent plus du modèle autonomiste qui a été dévoyé de son but originel, et qui est devenu un leurre ou une impasse pour le peuple catalan. Quant aux forces de la gauche catalane, qui ont perdu les dernières élections au Parlement de Catalogne (2010), elle est divisée entre partisans de l’indépendance (ERC et Inic.-Verts) et fédéralistes du PSC. Cependant, pour que le fédéralisme puisse fonctionner encore faut-il qu’il y ait des fédéralistes en Espagne, or rien n’est moins sûr. Du coup les socialistes catalans sont perplexes et divisés entre ces deux options. Il faut reconnaître que c’est un débat qui, en France, semble provenir d’une autre galaxie.

Après un refus récent de Mariano Rajoy à la proposition du président Artur Mas d’une Concertation Fiscale approuvée par le parlement catalan, il y aura dissolution et élections anticipées au Parlement de Catalogne le 25 novembre prochain. Si les forces politiques favorables à l’indépendance gagnent ces élections, elles proposeront un référendum (soi-disant anticonstitutionnel selon le gouvernement de Madrid). Des militaires à la retraite et la droite néo-franquiste se mobilisent déjà pour briser ce mouvement populaire. Hélas le royaume d’Espagne n’est pas la monarchie britannique, ainsi l’Ecosse aura certainement plus de chance à son référendum de 2014.

Des juristes, des constitutionnalistes et parlementaires catalans et autres travaillent intensément à une solution démocratique européenne (l’exemple pacifique de séparation et dissolution de l’ex-Tchécoslovaquie est parfois évoqué). Une solution qui pourrait débloquer une situation de crise politique qui existe ailleurs, en Belgique, en Italie, au Royaume Uni et en Espagne.

Manifestation du 11 septembre: ext.lavanguardia.es/pans/index.html
(Fête Nationale de la Catalogne, en mémoire du 11 septembre 1714)

mardi 10 juillet 2012

Olivier,
« Ils » ont dit que ton cœur avait «lâché»… et nous, nous tes amis des Pyrénées orientales, nous, tes amis des vielles terres des Aspres, des Albères, du Vallespir et de la Côte Vermeille, … nous, tous réunis dans l’incrédulité, nous ne pouvons pas croire que ce soit justement ton cœur, ton cœur en or, ton cœur inoxydable, ton cœur généreux qui, pour la première, fois ait pu jeter l’éponge.
Alors, dans ces moments d’hébétude, nous, tes amis catalans et gavatx, nous n’avons plus aujourd’hui que le souvenir de ton visage, de ton sourire et de ta silhouette légère qui symbolisaient si bien le renouveau de notre propre image par la jeunesse et la vitalité de tes idées. Nous n’avons plus que le souvenir de tes paroles, fraîches comme une brise de Collioure sur les chemins torrides des élections et de la politique locale.
C’était pour toi les premiers pas sur les routes impraticables du suffrage universel, tel qu’il se décline parfois en termes d’électoralisme, de démagogie, de clientélisme et même de trahison. Ni ton expérience, ni tes engagements, ni ton tempérament ne te préparaient à affronter ou à utiliser ces armes … d’ailleurs, si tu en fus la cible, tu n’en fis jamais usage. Le temps d’une courte campagne électorale ce fut au contraire et grâce à toi le carrefour des idées, le tourbillon des projets, l’enthousiasme d’une redécouverte des valeurs universelles qui font l’honneur de la politique, de la République et de la démocratie.
Et il nous fallait bien cette voix juvénile, portée par des engagements incorruptibles pour faire de nos vieilles circonscriptions catalanes une terre neuve, telle que tu en rêvais. Une terra nova : c’est désormais ainsi que nous verrons notre espace social et politique, si imparfait soit-il, car il a été transformé par notre amitié mutuelle, nourrie par de nouvelles convictions. Dans l’immobilisme d’une pratique politique dévoyée, tu as été ce Visiteur pasolinien scandaleux après le passage duquel se craquelle ce que l’on croyait être un temps figé.
Ton cœur, ton cœur en or, ton cœur généreux ne s’est pas arrêté, il bat en nous au rythme de l’amitié et si une terre t’accueille aujourd’hui elle en sera rénovée comme nous l’avons été de t’avoir connu et de t’avoir aimé.
Tes amis catalans et gavaxts des Aspres, des Albères, du Vallespir et de la Côte Vermeille.

jeudi 9 février 2012

Les législatives Nord-catalane offrent lors de chaque échéance un spectacle politique des plus lamentables à l'inverse mesure d'ailleurs, du consternant vide sidéral qui tient lieu de mandat dans l'intervalle.
Souvenez-vous : en 2007, c'est la 4e circonscription qui anima le désopilant barnum ! Le député sortant, Henri Sicre, qui de l'avis général n'avait pourtant pas démérité, a été prié, contre son gré, de faire valoir ses droits à la retraite ! Discipliné, il obtempérera. Un candidat dissident, exclu du PS, élimina, au 1er tour le candidat légalement investi et c'est la droite qui tira profit de ce singulier exploit ! Aujourd'hui, sans doute pour féliciter l'ex-exclu, le tout nouveau réintégré est devenu le candidat officiel de ce parti « hall de gare » d'où l'on entre et sort selon l'opportunité de ses déplacements politiciens. Comble de cohérence de cet impénétrable microcosme, personne  ne lui demande de liquider sa retraite bien qu'ayant atteint le même âge fatidique qui fut jadis fatal au député sortant. Comprenne qui pourra !
En 2012, le spectacle se prépare sur la 1ère  circonscription. Les défaveurs d'un découpage bien peu républicain n'offrent que peu de possibilité à la gauche. Pourtant en 1997 une candidature d'union portée par Jean Vila réussit l'impossible et montra par là l'unique voie praticable pour aspirer à un bon résultat. Mais décidément, la gauche locale ne semble pas apprécier les bonnes notes ! Toutes et tous se précipitent vers l'inexorable échec qui éliminera la gauche dès le 1er tour. Il ne faut pas être grand devin pour savoir qu'en matière électorale comme partout ailleurs, la quadrature du cercle est impossible ! L'émiettement immodéré des suffrages de gauche empêchera à l'une ou l'un des candidats d'atteindre le seuil de franchissement du 1er tour, tandis que la droite extrême et l'extrême droite se disputeront le podium ! Là encore, comprenne qui pourra !
Au moins que dans un inespéré sursaut de lucidité et par respect pour les électeurs, les apparatchiks de toutes obédiences ne se ressaisissent in extremis. Il est encore temps d'éviter le désastre !